Éditorial : pour des droits sexuels et reproductifs, pas des tragédies !

Violence sexuels

La découverte tragique de fœtus abandonnés à Bukavu, notamment à Nyamuhoza et dans d’autres localités du Sud-Kivu, est un cri d’alarme qui résonne au-delà des frontières de la honte et de l’indifférence. Le corps sans vie d’un fœtus d’environ sept mois, trouvé récemment jeté dans un caniveau à Nyamuhoza, est le symbole d’un échec collectif. Ces tragédies, fruits d’avortements clandestins, nous rappellent que les droits sexuels et reproductifs demeurent largement inaccessibles pour les femmes et les jeunes filles du Sud-Kivu et de la République démocratique du Congo.

Ce phénomène n’est pas seulement le résultat d’actes répréhensibles, mais le reflet d’une société marquée par des tabous culturels, des croyances ancrées et des pressions sociales qui stigmatisent les grossesses non désirées ou celles portées par des femmes non officiellement mariées.

Lire aussi : Nord-Kivu : « 38.000 femmes victimes de violence sexuelle dans des camps de déplacés sont sans assistances » ( Pramila Patten)

Pourquoi ces jeunes femmes se sentent-elles contraintes de recourir à des méthodes dangereuses pour mettre fin à des grossesses non désirées ?

La réponse réside dans un manque d’éducation sur la santé sexuelle, l’absence d’accès à des contraceptifs et des services de santé reproductive, ainsi que dans la pauvreté qui limite leurs choix.

Nous ne pouvons plus nous contenter de constater ce phénomène. Les récentes découvertes de fœtus à Mulonge et sur le lac Tanganyika, ainsi que d’autres cas similaires dans la province, soulignent l’urgence d’agir.

Les autorités doivent prendre conscience de la gravité de cette situation et mettre en place des programmes de sensibilisation pour éduquer les jeunes et leurs familles sur la santé reproductive.

L’accès à des contraceptifs sûrs et abordables doit être garanti, permettant ainsi aux jeunes femmes de faire des choix éclairés sur leur corps et leur vie.

Les lois en vigueur sur l’avortement en RDC doivent également être revues. Une législation plus inclusive et protectrice est essentielle pour éviter que des femmes ne se retrouvent dans des situations tragiques, à la merci de pratiques clandestines. La décriminalisation de l’avortement, notamment dans des contextes où la vie de la femme est en danger ou en cas de viol, est un pas nécessaire à renforcer.

Il est également crucial d’aborder le soutien psychologique pour ces femmes, souvent laissées seules face à la honte et à la culpabilité. La stigmatisation qui les entoure doit être combattue. Créer un environnement où les jeunes femmes peuvent parler librement de leurs expériences et de leurs besoins est une étape essentielle vers un changement durable.

Le rôle des médias est fondamental. Ils doivent sensibiliser le public à ces problématiques, déconstruire les mythes et ouvrir le dialogue sur la santé sexuelle et reproductive. En mettant en lumière ces tragédies, ils peuvent inciter à l’action et encourager une prise de conscience collective dans notre société.

Lire aussi : Nord-Kivu : des femmes et filles malades mentales , victimes de violence sexuelle à Rutshuru

La situation actuelle du Sud-Kivu n’est pas isolée ; elle s’inscrit dans une tendance mondiale où les droits des femmes, surtout ceux ayant trait à l’avortement continuent d’être bafoués. Il est temps de revendiquer un changement.

La lutte pour les droits sexuels et reproductifs des femmes et des jeunes filles en RDC est une lutte pour la dignité, la vie et l’autonomie.

Ensemble, faisons en sorte que ces tragédies ne soient plus qu’un triste souvenir, mais un tournant vers un avenir où chaque femme et chaque jeune fille pourra accéder à ses droits, vivre librement et choisir son destin, y compris celui d’avoir un enfant ou non !

Suzanne Baleke

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.