Dans le groupement de Mudaka, au nord du territoire de Kabare, les habitants des villages de Cinjoma, Kashungurhi et Murhala vivent une période d’inquiétude sans précédent. Depuis novembre dernier, aucune goutte de pluie n’est tombée, et les champs des familles paysannes, principales sources de leur subsistance, subissent les assauts d’une sécheresse persistante.
À Cinjoma, Juvenal Cizungu In’obuko observe amèrement ses parcelles.
« Si Dieu ne nous aide pas à travers les petits commerçants, nous risquons de mourir de faim. Il n’y a rien de prometteur dans nos champs. Normalement, on devrait déjà récolter les haricots et les maïs, mais jusqu’à aujourd’hui, il n’y a rien », confie-t-il. Les haricots, principaux revenus et source de protéines des ménages, sont les plus touchés, tandis que maniocs et patates douces peinent à pousser.
À Kashungurhi, Aimerance M’Cirezi, cultivatrice, raconte l’ampleur des dégâts.
« Parmi toutes les cultures, le haricot est la plus touchée. Je ne crois pas qu’on pourra même récolter 50 % des haricots. Les maniocs ne grossissent pas, et les patates douces poussent très mal. » Pour protéger ce qu’il reste, chaque villageois s’évertue à sauver ses cultures avec des moyens rudimentaires : arrosage manuel, engrais naturels composés de déchets animaux ou de végétaux.
À Murhala, M’Muciga Nankafu souligne l’impact social de cette sécheresse.
« Nos familles sont aujourd’hui très affamées. Nous espérions vendre nos récoltes pour payer les frais scolaires de nos enfants et préparer les fêtes de fin d’année. Mais rien ne marche. Nous n’avons pas récolté comme prévu, alors nous attendons seulement la volonté de Dieu. »
Pour ces communautés, la résistance est devenue une question de survie. Les cultivateurs espèrent que la prochaine saison leur permettra de se relever, mais en attendant, ils ne comptent que sur leur courage et leur capacité à rationner les maigres récoltes encore disponibles.
« Si chaque cultivateur garde ce qu’il récolte pour nourrir sa famille, peut-être qu’il tiendra jusqu’à la prochaine saison sans manquer de nourriture », ajoute M’Muciga.
Les habitants demandent avant tout la paix et la stabilité dans la région.
« Aux autorités, nous ne demandons que la paix. Car avec la paix, nous pourrions au moins faire du petit commerce pendant que nous attendons la pluie. Et peut-être même recevoir de l’aide humanitaire », plaide Juvenal à Cinjoma.
Cette sécheresse s’ajoute aux difficultés économiques déjà exacerbées par la déforestation dans le Parc National de Kahuzi-Bièga et les conséquences des conflits armés dans la province.
Pour des villages où plus de 80 % des habitants dépendent de l’agriculture, la situation est critique et souligne l’urgence d’un soutien humanitaire et de mesures de sensibilisation aux pratiques agricoles et environnementales adaptées au changement climatique.

