Dans le territoire de Kabare, au Sud-Kivu, le Parc National de Kahuzi-Biega (PNKB), classé patrimoine mondial de l’UNESCO, subit une déforestation accélérée. En cause : la production artisanale de charbon de bois, devenue un mode de survie pour de nombreuses familles confrontées à la pauvreté, à l’insécurité et à l’absence d’alternatives économiques viables. Le fragile équilibre écologique de cette zone riche en biodiversité est aujourd’hui gravement menacé.
Les collines verdoyantes du PNKB se vident lentement de leur couvert forestier. Des arbres centenaires tombent quotidiennement sous les coups de haches et de machettes, alimentant un commerce informel de charbon.
« Nous n’avons pas le choix. C’est ce qui nous permet de manger », témoigne Consolata Cibalonza, vendeuse de braises au marché de Murhesa. Les mains noircies par le charbon, elle incarne une réalité partagée par des centaines de femmes vivant autour du parc.
Le produit est partout. Les sacs de charbon inondent les marchés des villages riverains, mais les prix chutent, reflétant un marché saturé. Pour les familles, toutefois, renoncer n’est pas une option. « Même si les prix chutent, on continue. Mieux vaut vendre quelque chose que rien du tout », confie M’Cigoho, une autre commerçante locale.
Autrefois marginale, la production artisanale de charbon est aujourd’hui l’une des principales sources de revenus dans la région. Dans un contexte socio-économique dégradé, où les énergies alternatives sont quasi inexistantes, la forêt devient un dernier recours. Mais cette exploitation à grande échelle entraîne la destruction rapide d’un écosystème d’exception, refuge des derniers gorilles de plaine de l’Est.
La déforestation est facilitée par une insécurité persistante dans certaines zones de Kabare et à la lisière du parc. Des groupes armés, des coupeurs de bois clandestins et des exploitants illégaux opèrent souvent sans être inquiétés.
« Tant que l’État n’aura pas rétabli l’autorité dans les zones sensibles, il sera difficile de freiner la déforestation », avertit un membre d’une organisation de la société civile basée à Kavumu. « L’écosystème est attaqué de toutes parts. Il faut une réponse rapide, concertée, et durable. »
Face à l’aggravation de la situation, plusieurs associations environnementales appellent à une mobilisation générale pour sauver le PNKB. Des campagnes de sensibilisation ont timidement vu le jour, mais elles peinent à freiner l’exploitation destructrice alimentée par la misère ambiante.
« Nous sommes arrivés sur le lieu, une zone d’exploitation critique. C’est une région riche, en biodiversité comme en ressources. Mais cette richesse est aujourd’hui en train d’être vidée de sa substance. Si rien n’est fait, il ne restera plus que des souvenirs », lance un activiste environnemental joint sur place.
Les activistes environnementaux proposent plusieurs pistes pour limiter les dégâts :
la promotion de foyers améliorés afin de réduire la consommation de charbon, l’introduction d’énergies alternatives abordables, et surtout, la création de moyens de subsistance alternatifs pour les communautés locales.
Ils soulignent que seule une approche intégrée et inclusive, impliquant les populations locales, pourra garantir la sauvegarde durable de ce parc emblématique.
Cet article a été produit dans le cadre du projet « Habari za Mahali », une initiative du consortium RATECO, REMEL avec le soutien de Media4Dialogue de La Benevolencija.