Journée mondiale de la schizophrénie : à Bukavu, le besoin d’une prise en charge (Interview)

santé mentale
La schizophrénie

« Plusieurs cas de schizophrénie sont identifiés dans la ville de Bukavu mais pas pris en charge. Des malades déambulent dans la rue parce que la prise en charge de cette maladie n’est pas subventionnée par l’Etat congolais », c’est ce qu’affirme le docteur Philippe Amani Busane, spécialiste en Psychiatrie à l’Hôpital Général de Référence de Panzi. Il a dit à l’occasion de la célébration de la Journée mondiale de la schizophrénie. Une journée célébrée ce lundi 18 mars de chaque année.

Ce spécialiste explique que la schizophrénie est une pathologie grave sur le plan mental. La présence d’une personnalité schizoïde, c’est-à-dire les gens qui aiment s’isoler et s’écarter des autres, fait partie des plusieurs causes énumérées par le Dr Amani. Aussi, cette maladie est plus provoquée par des troubles que subissent les personnes vivant sous état de choc (cas du divorce, viol, guerre).

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Ce dernier rappelle que cette maladie ne se soigne pas à la maison, encore moins dans des chambres de prière.

Dr Philippe Amani Busane est l’invité de la Rédaction, il répond aux questions de La Prunelle RDC (Interview)

La Prunelle RDC : aujourd’hui le monde célèbre la journée mondiale de la schizophrénie, peut-on savoir qu’est-ce que la schizophrénie ?

Dr. Amani: la schizophrénie est une pathologie grave sur le plan mental. 

Dans le domaine de la santé mentale, c’est la plus grave des complications que nous pouvons avoir chez quelqu’un qui a connu pas mal de facteurs qui ont perturbés son état mental. En fait, pour cette maladie, c’est comme si la personne est séparée en deux, son esprit est séparé de son corps. Le malade se retrouve dans l’état de dissociation avec des bizarreries comportementales et en langage illogique. 

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La Prunelle RDC : quels sont les facteurs qui favorisent cette maladie ?Dr. Amani : Il y a beaucoup de facteurs qui favorisent cette maladie. C’est d’abord la présence d’une personnalité schizoïde. Ce sont des gens qui ont l’habitude de s’enfermer, qui ne collaborent pas avec les autres, les gens dont on doit toujours stimuler le contact quand on est ensemble. Deuxième élément, c’est une maladie génétique, où vous allez voir qu’il y a pas mal de personnes qui sont suivies dans des centres psychiatriques pour la schizophrénie.

La Prunelle RDC : pour ce qui est de schizophrénie, quelle est la catégorie de personnes la plus touchée par cette maladie ?

Dr Amani : ce sont des personnes dont les grossesses des mamans ont évolué sans suivi, et n’ont pas su qu’il y a eu des infections qui se sont développées. C’est une maladie qui peut attaquer la personne, dont la maman, pendant la grossesse souffrait d’un virus qu’on appelle Human papilona virus. Aussi, la situation que nous vivons chaque jour (situation de guerre, de conflit, d’insécurité, chômage, les personnes vulnérables, les orphelins, les victimes de viol…)  sont des facteurs qui prédisposent une personne à devenir schizophrène. 

La Prunelle RDC : cette maladie est-elle courante dans la province du Sud-Kivu et plus particulièrement à Bukavu ?

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 Dr. Amani: exactement, c’est la maladie la plus grave que nous avons au Sud-Kivu. Je pense qu’après la dépression et l’épilepsie, c’est la schizophrénie qui vient en troisième position.

La Prunelle RDC : Et puisqu’on en parle, la schizophrénie est-elle une maladie contagieuse, ou curable ?

Dr. Amani: d’abord c’est une maladie chronique.  Lorsqu’on laisse une personne évoluer avec la schizophrénie, elle ne pourra jamais guérir. Toute la vie, cette personne sera dépendante de médicaments qu’on appelle les psychotropes. Il faut savoir qu’une fois la schizophrénie est là, le malade devient incapable majeur, il va commencer à dépendre de tout le monde sur le plan social, psychologique et sur le plan médicamenteux. 

La Prunelle RDC : comment prendre en charge les personnes atteintes de cette maladie dans la société ?

 Dr.Amani : la schizophrénie ne se gère pas à la maison, dans les chambres de prière, encore moins chez les guérisseurs traditionnels elle se soigne dans un hôpital, où il y a un médecin qu’on appelle spécialiste en psychiatrie ou dans une structure où il y a un généraliste bien formé en ce domaine. Elle se soigne avec des médicaments. On doit aussi travailler la relation de la personne par rapport à son entourage ou environnement, et faire la réadaptation ou éradication de la personne sur le plan social. Cela, afin qu’il puisse commencer à mener sa vie comme les autres même s’il est sous médicament à vie.

La Prunelle RDC : enfin, Dr Amani, avez-vous un message à l’égard de la population de Bukavu et ses périphéries ?

 Dr.Amani : lorsque vous avez un schizophrène, la première des choses c’est de l’aimer comme les autres et ne pas le stigmatiser. La deuxième de chose est qu’il faut savoir qu’il n’a pas voulu être ce qu’il est. Si vous avez un schizophrène dans la maison, vous avez le devoir d’approcher un centre psychiatrique avec des malades pour des soins appropriés et payer leur hospitalisation.

Propos recueillis par Suzanne Baleke

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