La FAO tire la sonnette d’alarme : 34 % de la population rurale du Sud-Kivu en insécurité alimentaire

Journée Mondiale des Femmes Rurales

Le Sud-Kivu, province de l’est de la République Démocratique du Congo, est confronté à une insécurité alimentaire alarmante, comme l’indiquent les données récentes de l’Organisation pour l’Alimentation et l’Agriculture (FAO). Sur les huit territoires analysés, six, à savoir Idjwi, Kabare, Mwenga, Shabunda, Uvira et Walungu, sont classés en phase de Crise, tandis que Fizi et Kalehe se trouvent en phase d’Urgence. Au total, environ 34 % des populations rurales, soit environ 2,4 millions de personnes, souffrent d’une insécurité alimentaire élevée durant la période allant de juillet 2023 à juin 2024.

Ces données ont été consultées par La Prunelle RDC à l’occasion de la célébration de la journée Africaine de la sécurité alimentaire et nutritionnelle célébrée le 30 octobre de chaque année.

Lire aussi : Journée mondiale de l’alimentation : « l’eau c’est la vie, l’eau nous nourrit, ne laisser personne de côté »

Pour la période projetée de janvier à juin 2025, bien que des signes d’amélioration soient attendus, 25 % des ménages de la province devraient rester en phase de Crise (Phase 3 de l’Indice de la Sécurité Alimentaire, IPC) ou d’Urgence (Phase 4 de l’IPC), équivalant à environ 1,7 million de personnes.

À l’exception de Bukavu, qui maintiendra sa situation en phase 2, tous les autres territoires devraient voir leur situation s’améliorer.

Les territoires d’Idjwi, Kabare et Mwenga passeront en phase de Stress (Phase 2), tandis que Fizi et Kalehe resteront en Crise. Les territoires de Shabunda, Uvira et Walungu devraient également enregistrer une diminution du pourcentage de leur population en phase 3 ou plus de l’IPC.

Les populations les plus touchées par cette crise sont principalement les déplacés internes, les familles d’accueil, et celles vivant dans des zones de conflit ou affectées par des catastrophes naturelles. Les personnes les plus pauvres dans les zones urbaines et périurbaines, ainsi que celles dépendantes des marchés, se trouvent également parmi les plus vulnérables.

Selon la FAO, cette situation est aggravée par la conjoncture sécuritaire instable, résultant des affrontements réguliers entre les Forces armées de la République Démocratique du Congo (FARDC) et divers groupes armés, notamment les Maï-Maï et Raia Mutomboki.

La situation humanitaire dans l’est du pays, particulièrement dans l’Ituri, le Nord et le Sud-Kivu, est marquée par des défis persistants depuis plus de deux décennies. L’activisme des groupes armés entrave la mise en œuvre d’investissements dans les infrastructures socio-économiques, nuisant ainsi aux moyens d’existence des ménages. Environ 1,5 million de personnes ont été déplacées, causant des pertes de vie et perturbant gravement les moyens de subsistance.

Lire aussi : Journée Mondiale de l’alimentation : les systèmes alimentaires doivent être reconnectés pour stopper l’escalade de la faim et atténuer les effets du climat

L’analyse nutritionnelle de 2023 révèle une situation alarmante en matière de malnutrition dans le Sud-Kivu. Le taux de malnutrition chronique a augmenté, passant de 48 % en 2018 à 58 % en 2023, malgré les efforts de divers partenaires. En outre, 31,8 % de la population souffre de malnutrition chronique sévère, et 6,4 % des enfants de moins de cinq ans sont touchés par la malnutrition aiguë.

Les facteurs contribuant à cette insécurité alimentaire comprennent les affrontements entre les FARDC et les groupes armés, la récurrence des violences dans les zones agricoles, les catastrophes naturelles, et la dépréciation de la monnaie nationale. Ces éléments limitent l’accès aux marchés et augmentent les prix des produits alimentaires, rendant la situation encore plus critique pour les populations vulnérables. Dans les territoires de Kabare et Walungu, par exemple, plus de 70 % des ménages consacrent une part importante de leurs revenus à l’alimentation.

Au niveau national, les données FAO indiquent qu’environ 40,8 millions de Congolais souffrent d’insécurité alimentaire chronique, dont près de 15,8 millions en situation sévère.

Cette situation appelle à des actions urgentes et coordonnées entre le gouvernement et les partenaires techniques et financiers. Les recommandations incluent le renforcement des mécanismes de réconciliation et de paix, l’amélioration des infrastructures et des systèmes de production alimentaire, ainsi que le soutien à des programmes de relance agricole adaptés aux réalités locales.

La situation au Sud-Kivu n’est qu’un exemple des défis plus larges rencontrés dans l’ensemble de la République Démocratique du Congo, où des millions de personnes vivent dans la précarité alimentaire. L’intervention immédiate et coordonnée est cruciale pour prévenir une aggravation de la crise, alors que la sécurité alimentaire devrait devenir une priorité nationale.

Suzanne Baleke

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.