Le Groupe d’experts de l’ONU a constaté une augmentation des activités d’un réseau criminel composé de civils, d’acteurs économiques et d’intermédiaires burundais et congolais et d’agents burundais en tenue qui se livraient à la contrebande de l’or entre la République démocratique du Congo et le Burundi.
C’est ce que La Prunelle RDC peut lire dans le récent rapport du Groupe d’Experts de l’ONU autour de la contrebande minière.
Plusieurs sources ont informé le Groupe d’experts que les tensions actuelles entre la République démocratique du Congo et le Rwanda avaient perturbé la route de la contrebande de l’or vers le Rwanda car les autorités congolaises avaient augmenté le contrôle des biens et des personnes transitant par la frontière.
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« Par conséquent, les contrebandiers, y compris ceux liés aux groupes armés qui contrôlent les sites de production d’or dans les territoires d’Uvira et de Fizi, détournent de plus en plus le transfert illicite de l’or vers le Burundi, qui s’est avéré une plaque tournante de l’or commercialisé illégalement depuis la République démocratique du Congo ».
Le Groupe d’experts a également identifié un homme qui était au cœur des activités du réseau. Il s’est présenté sous différents noms, Célestin Nduwimana ou Gedeon Bigirimana, et comme ayant des occupations différentes, agent de renseignement burundais basé à Uvira ou policier burundais détaché à Uvira, où il prétendait assister le contingent burundais de la force régionale de la Communauté d’Afrique de l’Est.
« Or, Le numéro de téléphone de la République démocratique du Congo utilisé par Célestin Nduwimana était enregistré sous un autre nom. D’après de nombreuses sources, Nduwimana était un intermédiaire clé qui mettait des contrebandiers de la République démocratique du Congo en contact avec des acheteurs du Burundi. Le Groupe d’experts a confirmé qu’à six reprises au moins, entre décembre 2022 et mars 2023219, Nduwimana a facilité l’acheminement d’or pour un total de 11 kg220 », dit le rapport.
Selon les informations reçues, ces transactions ont généré l’équivalent de 455 000 dollars.
Ces six transactions ont révélé le modus operandi du réseau criminel concerné. Nduwimana a d’abord contacté des contrebandiers à Uvira pour leur faire part de son intérêt et leur promettre une opération lucrative au Burundi, leur garantissant la protection des autorités burundaises une fois qu’ils auraient franchi la frontière.
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« L’or provenant de la République démocratique du Congo a ensuite été bl nchi par l’intermédiaire de coopératives officielles au Burundi. Plusieurs sources complices ont dit au Groupe d’experts que Nduwimana facilitait également les contacts entre les contrebandiers souhaitant passer au Burundi et les représentants des coopératives gérant des sites miniers au Burundi. Au cours de ses enquêtes, le Groupe d’experts a par exemple obtenu un document manuscrit décrivant un accord frauduleux entre les coopératives Koribilorwa Twikenure Minyago et Dukorere Hamwe Dusoze Ikiwi pour acheter de l’or à des individus en provenance de la République démocratique du Congo ».
L’un des signataires de ce document est Noël Nshimirimana. Le Groupe d’experts a obtenu un numéro de téléphone utilisé par Nshimirimana pour entrer en contact avec d’autres membres du réseau et constaté qu’il était enregistré sous un autre nom.
Selon plusieurs personnes servant de « mules » (transporteurs) pour ce réseau criminel, l’or qu’elles transportaient vers le Burundi provenait des sites miniers de Misisi ou de Nyange, en République démocratique du Congo. Au moment de passer la frontière, elles répartissaient l’or entre plusieurs personnes afin de réduire le risque de tout perdre en cas d’arrestation.
Toutefois, traverser la frontière entre Uvira, en République démocratique du Congo, et le Burundi présentait peu de problème, compte tenu du laxisme des contrôles et de l’absence de scanners ou de fouilles permettant de détecter le minerai.
Selon des sources des services de sécurité de la République démocratique du Congo et des personnes contactées par Nduwimana, celui-ci a déclaré qu’il agissait sur ordre de ses chefs hiérarchiques. Le Groupe d’experts n’a pas été en mesure de confirmer si Nduwimana opérait à titre officiel ; cependant, il a rassemblé un ensemble de preuves démontrant qu’il agissait avec la bénédiction de hauts fonctionnaires.
Trois « mules » ont informé le Groupe d’experts qu’elles avaient été arrêtées à deux postes de contrôle de police sur la route entre Bujumbura et Muyinga alors qu’elles transportaient de l’or.
Le chauffeur a mentionné le nom d’un général burundais et elles ont pu passer sans encombre.
D’après ces « mules », les policiers burundais avaient été prévenus de leur passage.
Selon trois autres sources bien informées et citées par le Groupe d’Experts, Nduwimana a facilité une rencontre, dans le district de Kamenge, entre des personnes appartenant au réseau de contrebande et un ressortissant burundais, qui s’est présenté comme le général Thierry Habimana.
Au cours de cette réunion, Habimana a indiqué qu’il était prêt à apporter son appui.
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Deux autres « mules » ont indiqué que lorsqu’elles avaient été interpellées pour être fouillées au poste frontière de Gatumba, la fouille avait été interrompue après que Nduwimana eut appelé un agent de la police burundaise.
Dans une lettre adressée au Groupe d’experts en avril 2023, les autorités burundaises ont déclaré que les coopératives susmentionnées n’étaient pas impliquées dans l’exploitation de l’or de la République démocratique du Congo et que les personnes identifiées par le Groupe d’experts leur étaient inconnues.
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