« L’amélioration de l’offre de Santé sexuelle et la modification des savoirs et perceptions sur les contraceptifs pour une meilleure acceptation constituent des moyens efficaces dans la lutte contre les avortements clandestins. », c’est ce qu’affirme Alice Bulambo, infirmière à l’Hôpital Général de Référence de Nyangezi, dans un entretien avec La Prunelle RDC, ce mercredi 24 octobre 2024.
Actuellement, dans la ville de Bukavu et ses environs, il ne se passe plus un mois sans qu’un avorton ne soit déclaré. Par exemple, le mercredi 23 octobre 2024, le corps sans vie d’un fœtus a été découvert, jeté dans un caniveau à Nyamuhoza, dans le groupement de Mudusa, territoire de Kabare en province du Sud-Kivu.
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Selon la Société Civile Forces Vives de Mudusa, le corps d’un fœtus d’environ sept mois a été retrouvé dans un caniveau sur la Route Nationale N°5.
Pour Madame Bulambo, les causes de ces avortements clandestins sont souvent d’ordre socio-culturel et financier. De nombreuses jeunes filles manquent d’instruction sur la santé sexuelle au sein de leur communauté. En cas de grossesse non désirée, elles craignent d’être jugées par la société et se tournent vers l’avortement.
Cela se produit malgré les dispositions du Protocole de Maputo sur les droits reproductifs des femmes, qui autorise l’avortement médicalisé en cas d’agression sexuelle, de viol, d’inceste, ou lorsque la grossesse met en danger la santé mentale et physique de la mère ou la vie du fœtus.
Malheureusement, plusieurs risques sont liés à cette situation tragique, soulevant une question cruciale : les jeunes filles sont-elles suffisamment instruites sur l’éducation sexuelle et reproductive ? Quand la communauté comprendra-t-elle que la santé sexuelle ne doit pas être un sujet tabou ? Tant que cette question demeurera ignorée, les avortons continueront d’être retrouvés dans les rues.
« Les causes des avortements clandestins sont d’ordre individuel, telles que l’image de soi, la valeur personnelle, et les croyances. Les facteurs micro-environnementaux, tels que l’entourage et l’influence des amis, jouent également un rôle important », explique-t-elle.
Sur le plan financier, Madame Bulambo souligne que le manque de moyens chez les parents figure parmi les causes des avortements clandestins.
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« Les jeunes filles se tournent vers les avortements clandestins en raison de la pauvreté de leurs parents. Elles craignent de garder la grossesse, car leurs parents ont du mal à subvenir à leurs besoins, surtout en ce qui concerne la prise en charge de la grossesse », ajoute-t-elle.
La question du refus de la grossesse par les pères des fœtus contribue également aux avortements clandestins, impactant négativement la vie des jeunes filles.
« Les avortements clandestins constituent une mauvaise pratique qui peut entraîner des conséquences graves, dont la gravité dépend de divers éléments de contexte. C’est une pratique qui peut conduire à la mort », avertit-elle.
Face à cette situation préoccupante, Alice Bulambo insiste sur la nécessité de modifier les savoirs et les perceptions sur les contraceptifs pour une meilleure acceptation. Elle estime qu’il est temps d’agir sur l’environnement familial, notamment en ce qui concerne l’éducation sexuelle des jeunes filles et des jeunes garçons.
Elle appelle également les autorités à prendre leurs responsabilités pour lutter contre le chômage chez les jeunes et soutenir les familles.