Santé mentale au Sud-Kivu : des chiffres inquiétants !

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La schizophrénie

Jusqu’au premier semestre 2024, 49.655 cas de problèmes de santé mentale ont été rapportés par le Bureau de Coordination de la Santé Mentale au Sud-Kivu. Des chiffres issus des structures intégrées dans la pyramide sanitaire provinciale. C’est ce qu’a déclaré Dévote Ciregano Mulangala, coordinatrice du Programme National de Santé Mentale au sein de la Division Provinciale de la Santé du Sud-Kivu.

Cette déclaration a été faite en marge de la Journée mondiale de la santé mentale, célébrée le 10 octobre de chaque année. Pour l’année 2024, le thème retenu est « Il est temps de donner une priorité à la santé mentale sur le lieu de travail », tandis que le thème national est « Investissons dans la santé mentale en milieu de travail ».

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Selon le docteur Dévote, la santé mentale se réfère à la façon dont une personne pense, se sent et agit dans sa vie. Elle reflète également la perception qu’une personne a d’elle-même, des autres et de son environnement.

Elle revient sur la définition de l’OMS, qui stipule que la santé mentale repose sur quatre aptitudes : avoir des relations satisfaisantes avec autrui, participer de manière constructive aux modifications de son environnement, résoudre ses conflits de manière équilibrée et développer sa personnalité en s’investissant dans des réalisations sociales.

« La santé mentale en milieu de travail est un état dynamique dans lequel un individu est capable de mobiliser ses compétences cognitives, affectives et comportementales pour s’adapter efficacement aux exigences de son travail, sans en subir de conséquences négatives sur son bien-être émotionnel, psychologique et social ».

Elle ajoute qu’aujourd’hui, 15 % des adultes en âge de travailler estiment souffrir d’un trouble mental, la dépression et l’anxiété entraînant chaque année la perte de 12 milliards de jours de travail, ce qui représente une perte de productivité de 1.000 milliards de dollars par an, selon l’OMS (2019).

La pandémie de COVID-19 a provoqué une augmentation de 25 % de l’anxiété générale et de la dépression dans le monde, et les milieux de travail n’ont pas été épargnés, selon le docteur Dévote.

« Dans notre pays, il n’existe aucune donnée sur la santé mentale des travailleurs. Cependant, dans un pays où la majorité de la population vit « au jour le jour », avec moins d’un dollar par jour, et en l’absence d’un cadre de travail sain, il n’est pas surprenant de constater un nombre croissant de cas de troubles mentaux et psychosociaux dans les milieux de travail. Dans la province du Sud-Kivu, de plus en plus de personnes sont confrontées à des problèmes de santé mentale liés à des situations traumatiques récurrentes dans un contexte de post-conflit, de pauvreté, de guerre, ainsi qu’à des catastrophes telles que des incendies de maisons, des éboulements, des inondations et des épidémies (comme le MPOX), sans oublier les dégradations des conditions sociales ».

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 Elle évoque également la question de l’accessibilité aux soins de santé mentale et de soutien psychosocial, souvent entravée par des mythes persistants autour des troubles mentaux dans les communautés.

« Au premier semestre 2024, les structures intégrées dans la pyramide sanitaire provinciale ont rapporté 49.655 cas de problèmes de santé mentale, la plupart n’ayant pas bénéficié d’une prise en charge de qualité », précise-t-elle.

Dévote Ciregano Mulangala souligne que l’investissement dans la santé mentale au Sud-Kivu en milieu de travail nécessite une approche intégrée et consciente des défis locaux. Elle formule six recommandations, parmi lesquelles : favoriser un environnement sain et épanouissant pour tous les travailleurs, remodeler l’environnement de travail afin de diminuer les risques psychosociaux, mettre en place des services de soutien psychologique accessibles et confidentiels dans les milieux de travail, renforcer la sensibilisation et les compétences de dépistage des problèmes de santé mentale chez tous les travailleurs et enfin soutenir les travailleurs souffrant de problèmes de santé mentale pour qu’ils puissent continuer à travailler et s’épanouir.

Cette spécialiste en santé mentale exhorte également à instituer des journées spécifiques pour la santé mentale et à initier des activités de gestion du stress telles que des voyages, des danses, de la méditation et du sport.

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À l’occasion de la 32e Journée mondiale de la santé mentale, Dévote Ciregano appelle à une approche intégrée, collaborative, inclusive et adaptée aux réalités locales.

« Maintenons donc ce bien-être et construisons ensemble un lieu de travail où chaque personne peut s’épanouir, réaliser un travail productif, résoudre les difficultés de la vie et avoir accès rapidement aux soins et services de santé mentale dont elle a besoin lors de perturbations ».

Elle conclut en invitant les employés et les employeurs à créer et maintenir un milieu de travail sain, respectueux, inclusif, sécuritaire et productif.

Vinciane Ntabala

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